13 novembre 2015 : La nuit où Paris a basculé dans l'horreur

La tour Eiffel entourée du Bataclan et du Carillon
La tour Eiffel entourée du Bataclan et du Carillon (AFP - Polifra)

Le 13 novembre 2015, Paris respire la légèreté d’un vendredi soir d’automne. Les rires s’élèvent des terrasses, les fans affluent vers le Bataclan pour voir le groupe de métal "Eagles of the Death Metal", et au Stade de France, les supporters s’apprêtent à voir la France affronter l’Allemagne. Une nuit ordinaire, presque insouciante.

Mais bientôt, le bruit des balles couvrira celui des conversations, et les sirènes remplaceront la musique. En quelques heures, la ville des lumières s’éteindra dans l’horreur.

Le Stade de France visé en premier

Ce soir là, la France reçoit au stade de France l'équipe d'Allemagne pour une rencontre amicale. Le stade est plein : environ 80 000 spectateurs ont pris place dans les tribunes, parmi lesquels le président de la République François Hollande, le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve et le ministre allemand des Affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier.

Vers 21 h 16, alors que le match a débuté depuis une quinzaine de minutes, une première explosion retentit à proximité de la porte D. Quelques instants plus tôt, une voiture conduite par Salah Abdeslam a déposé trois hommes aux abords du stade. Deux d’entre eux ont tenté de pénétrer dans l’enceinte mais ont été refoulés par les agents de sécurité, faute de billets valides.

Peu de spectateurs se trouvent à l’extérieur à ce moment-là. Le premier kamikaze, Ammar Ramadan Mansour Mohamad al-Sabaawi, un Irakien d’une vingtaine d’années originaire de Mossoul, déclenche sa ceinture explosive, composée de TATP, de piles et de boulons. Il tue Manuel Dias, un supporter installé à la terrasse de la brasserie l’Events, et blesse plusieurs autres personnes.

Quatre minutes plus tard, à 21 h 20, une seconde explosion survient près de la porte H. Le deuxième terroriste, Mohammad al-Mahmod, également originaire d’Irak et arrivé en Europe via la Grèce le 3 octobre 2015, déclenche à son tour sa charge explosive à l’extérieur du stade, faisant plusieurs blessés.

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Vidéo de l'explosion à l'extérieur du Stade de France (TF1)

La troisième explosion et dernière explosion intervient à 21 h 53, rue de la Cokerie. Le kamikaze Bilal Hadfi, un Français de 20 ans résidant à Neder-Over-Heembeek, en Belgique, se fait exploser à distance du stade, sans faire d’autres victimes.

Au total, les trois explosions aux abords du Stade de France font un mort (hors terroristes), sept personnes en urgence absolue et 52 personnes blessés légèrement. Les assaillants ont en tout tenté à quatre reprises d’entrer dans le stade, pour y commettre un carnage bien plus important mais grâce au dispositif de sécurité et à la vigilance des agents, leur plan a été mis à mal.

À l’intérieur du stade, les autorités décident de maintenir le match pour éviter un mouvement de panique. Le président Hollande, informé de la situation, est discrètement évacué vers 21 h 30 avec le ministre de l'intérieur, Bernard Cazeneuve. Les spectateurs, eux, restent confinés jusqu’à la fin de la rencontre, l’enceinte étant jugée plus sûre face à une menace extérieure encore mal cernée.

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Le moment où François Hollande est prévenu des attaques en cours dans la capitale (GoffPhotos)

Les terrasses du 10e et 11e arrondissement prises pour cible

À 21 h 25, alors que les premières détonations résonnent près du Stade de France, un second commando entre en action dans les 10e et 11e arrondissements de Paris, visant les terrasses de bars et de restaurants, bondées en ce vendredi soir d’automne.

Trois hommes circulent à bord d’une Seat León noire immatriculée en Belgique : Abdelhamid Abaaoud (28 ans), Brahim Abdeslam (31 ans) et Chakib Akrouh (25 ans). Abaaoud, djihadiste belge d’origine marocaine, est un vétéran du jihad en Syrie, déjà bien connu des services de renseignement. Il est soupçonné d’être le cerveau des attentats.

Le commando commence son périple meurtrier à l'angle des rues Alibert et Bichat, où ils tirent en rafale sur les clients attablés aux terrasses du Carillon et du Petit Cambodge. Les rafales de kalachnikov font 13 morts et 10 blessés graves et 12 blessés légers. Non loin, des pompiers en intervention dans un Franprix entendent les tirs et assistent à la scène. L’un d’eux déclenche immédiatement un appel radio pour demander le Plan Rouge, déclenchant l’arrivée des premiers renforts.

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Les terrasses des cafés Le petit Cambodge et Le Carillon, cibles des attentats du 13 novembre 2015 à Paris, le 7 octobre 2016 (Joël Saget - AFP)

Quelques minutes plus tard, à 21 h 32, les terroristes ouvrent à nouveau le feu à l’angle de la rue de la Fontaine-au-Roi et du faubourg du Temple, ciblant la terrasse du bar La Bonne Bière et le restaurant Casa Nostra. Cinq personnes y sont abattues, 8 personnes sont en urgence absolue et 8 blessés plus légèrement.

À 21 h 36, le commando poursuit sa route vers le 92 rue de Charonne, où la terrasse du restaurant La Belle Équipe est pleine : une soixantaine de personnes y célèbrent des anniversaires et des pots de départ. Là, les terroristes agissent de manière coordonnée : l’un tire en rafale de gauche à droite, puis dans l’autre sens, un second arrose les voitures qui passent, tandis que le troisième, froidement, achève les blessés à bout portant. En quelques minutes, 19 personnes sont tuées, 12 sont en urgence absolue et 5 en urgence relative, le sol maculé de sang jusqu’aux égouts. Les riverains descendent dans la rue avec des trousses de secours pour tenter de sauver les blessés, dans un climat de sidération.

Le périple meurtrier s’achève à 21 h 40, lorsque Brahim Abdeslam entre seul dans le Comptoir Voltaire, sur le boulevard du même nom. Après quelques mots échangés avec la serveuse, il actionne sa ceinture explosive. Seule la charge arrière de l’explosif se déclenche, le tuant sur le coup. Plusieurs personnes sont grièvement blessées par les éclats de vis et de boulons projetés dans la salle.

Les deux autres membres du commando, Abaaoud et Akrouh, prennent la fuite. Leur véhicule, la Seat noire, sera retrouvé le lendemain à Montreuil, contenant trois kalachnikovs, cinq chargeurs pleins et onze vides. Selon les experts, plus de 400 coups de feu ont été tirés en moins de 15 minutes, dont 116 cartouches uniquement sur les terrasses du Carillon et du Petit Cambodge.

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Terrasse du restaurant La Belle Équipe après les attaques des trois terroristes (AFP)

Le Bataclan, épicentre du drame

Le pire est malheureusement encore à venir au Bataclan. Ce soir là, la salle est remplie, 1 500 personnes sont venues assister au concert du groupe américain de métal, Eagles of Death Metal. Tout le monde profite à fond du spectacle, que ce soit dans la fosse, ou dans les étages, au niveau des balcons. Un spectateur témoignera plus tard : « C'était bon enfant, sympa, bonne musique, tout le monde s'éclate. Ca aurait du être ça ce soir. »

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Les Eagles of Death Metal au Bataclan, avant la fusillade meurtrière (Marion Ruszniewski - Rock&Folk - AFP)

À 21 h 40, trois jeunes Français arrivent en Volkswagen Polo noire. Ils ouvrent immédiatement le feu sur les personnes rassemblées devant le Bataclan Café. Le chef de la sécurité décide alors de faire rentrer tout le monde dans le Bataclan, toutes les personnes dans le hall se retrouvent alors du côté de la fosse.

Sept minutes plus tard, les terroristes pénètrent dans la salle. Ils tirent d’abord en rafales sur la fosse, puis méthodiquement, coup par coup. Le carnage dure vingt minutes. Vingt minutes d’enfer. Environ 1 200 personnes sont alors dans la fosse. Par réflexe, les spectateurs se jettent au sol. Quand il n’y a plus d’issue, il ne reste qu’une option : faire le mort. Les agents de sécurité vont alors rapidement ouvrir les issues de secours situées sur la gauche du bâtiment pour permettre au maximum de personnes de s'enfuir.

Mais l'espace est trop restreint pour faire sortir tout le monde et un embouteillage commence à se créer dans toute la panique. C'est là que les terroristes vont en profiter pour en tuer encore d'avantage avant qu'ils ne puissent s'échapper de cet enfer. Pour les personnes étant couchés dans la fosse, le seul moyen de sortir est d'attendre que les terroristes soient en train de changer de chargeur de munitions pour sortir le plus vite possible.

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Plan de la salle du Bataclan (Netflix - Polifra)

À 22 h 30, la colonne d’assaut de la BRI, appuyée par une dizaine d’hommes du RAID, commence à investiguer l’intérieur du Bataclan. Les policiers savent que deux terroristes se trouvent encore dans le bâtiment, mais ignorent leur position exacte : l’information transmise par les agents de la BAC n’a pas circulé jusqu’à eux. En progressant, les forces spéciales atteignent la fosse et découvrent l’ampleur du massacre. Jusqu’alors, les blessés étaient restés silencieux, paralysés par la peur d’être achevés. La douleur reprend soudain le dessus : des gémissements, des râles, des appels étouffés commencent à monter dans la salle. Le groupement d’intervention décide de sécuriser le bas de la salle et d’évacuer ceux qui peuvent encore se déplacer.

Mais beaucoup hésitent. Craignant qu’un simple mouvement soit pris pour une menace, certains demeurent immobiles malgré les ordres. Progressivement, les premiers rescapés se relèvent, posent les mains sur la tête et avancent en escaladant les corps qui jonchent le sol. Pour eux, c’est la sortie vers la liberté, après près d’une heure plongés entre la peur, les tirs et l’odeur des cadavres. Certains, sidérés, gardent leurs mains sur la tête même en arrivant auprès des pompiers.

Vient ensuite l’évacuation des blessés graves. Des civils aident les policiers et les secouristes à transporter les victimes vers des zones protégées, où les hémorragies peuvent être stoppées avant un transfert vers un hôpital déjà en alerte. Faute de matériel suffisant, policiers et pompiers improvisent des brancards avec des barrières métalliques pour les acheminer jusqu’aux camions de secours.

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Secouristes et victimes quittant le Bataclan (Miguel Medina - AFP)

Pour ceux situés aux balcons, le même réflexe s’impose : se coucher au sol, chercher à se protéger derrière les sièges, malgré leur faible épaisseur. Certains gagnent en file indienne le fond du balcon droit, où se trouve une petite loge. D’autres, sur le balcon gauche, se dirigent vers les fenêtres et s’y accrochent, suspendus aux murs du Bataclan pour tenter d’échapper aux balles.

Deux des terroristes montent à l’étage, tandis que le troisième se dirige vers la scène. À l’étage, les assaillants regroupent une vingtaine de survivants contre un mur pour s’en servir d’otages. Quiconque supplie, gémit ou proteste est immédiatement abattu. De leur position dominante, ils observent la fosse et tirent au coup par coup sur ceux dont le téléphone sonne ou dont un mouvement trahit la vie.

À 21 h 50, un équipage de la Brigade anticriminalité (BAC), composé d’un commissaire et d’un brigadier, arrive sur place. Les premiers rescapés, hagards, les supplient d’intervenir. Sans attendre les renforts, ils décident de pénétrer dans la salle. À l’intérieur, ils sont frappés par la lumière crue des projecteurs et par un silence total. En progressant jusqu’au bar, le commissaire aperçoit Samy Amimour sur la scène, tenant un otage en joue. Il ouvre le feu à six reprises. Touché, le terroriste s’effondre, mais déclenche sa ceinture explosive dans un dernier geste. L’onde de choc traverse la salle. Sous le feu nourri des deux autres assaillants, les policiers se replient.

La mort du premier terroriste modifie la tactique des deux survivants. Ils rassemblent leurs otages et les emmènent vers une porte située à gauche du balcon qui mène vers un couloir avec un escalier. Le couloir est étroit : à peine dix mètres de long pour un mètre cinquante de large. Les otages sont placés contre les fenêtres et la porte. L’un des terroristes prend position au niveau de l’escalier, l’autre garde la porte. À 22 h 07, l'un des terroriste va ouvrir la fenêtre et tirer vers le bout de la rue, où sont postés des policiers. Puis, ils voient, dans un appartement en face, une personnes qui regarde la télévision et décident de l'abattre froidement.

Pendant ce temps, le président de la République rejoint le ministère de l’Intérieur, dans la salle de crise. La Brigade de recherche et d’intervention (BRI), initialement mobilisée rue de Charonne, reçoit l’ordre de se rendre directement au Bataclan. À 22 h 18, ses hommes arrivent sur place. Ils découvrent une zone bouclée, saturée de véhicules de police et de camions de pompiers, tandis qu’à l’intérieur, la prise d’otages se poursuit.

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Cellule de crise du ministère de l'Intérieur, le soir du 13 novembre (Netflix)

À 23 h 15, une seconde colonne rejoint la première pour prendre d’assaut les deux escaliers menant à l’étage. Le chef de la BRI a d’abord l’impression que les terroristes ont fui et que l’assaut arrive trop tard. Mais la colonne qui progresse à gauche se heurte à la porte du couloir et comprend que les assaillants s’y trouvent encore avec des otages. Sous la contrainte, l’un des otages crie : « Reculez ! On est vingt, on est pris en otage, ils ont des ceintures d’explosifs et des Kalachnikovs ! Si vous reculez pas, ils vont tout faire péter ! » Les ravisseurs récupèrent alors les téléphones, en conservent certains et contactent les policiers.

À l’extérieur, un poste de commandement s’organise au Baromètre, un bar situé à proximité, sous la supervision du préfet de police Michel Cadot. Les négociateurs comprennent rapidement que les discussions n’aboutiront pas : les deux terroristes ne formulent aucune revendication, ne demandent rien et semblent avoir accepté l’idée de mourir sur place. Quatre appels auront lieu en environ une heure, sans résultat.

Le ministre de l’Intérieur reçoit alors la demande de déclencher l’assaut. En concertation avec le président de la République et le Premier ministre, l’autorisation est donnée. Cette période d’attente permet aussi aux terroristes de se préparer à un affrontement final. À 23 h 53, François Hollande s’adresse à la nation, qualifie les attaques « d’horreur », appelle à ne pas céder à la peur et annonce la mise en place de l’état d’urgence ainsi que le rétablissement des contrôles aux frontières.

Il est 0 h 18 quand l'assaut est lancé. Les deux terroristes se sont positionnés au fond du couloir, face à la porte, prêt à ouvrir feu. Les unités d’intervention sont équipées du bouclier Ramsès, de fusils d’assaut, de gilets lourds et de casques blindés. Ils tentent d’enfoncer la porte qui leur résistait plus tôt mais derrière, les otages sont assis pour bloquer l'arrivée. Le premier coup de bouclier la fait plier ; au quatrième, elle cède. Les otages ont juste le temps de se décaler. L’un des terroristes ouvre immédiatement le feu avec sa Kalachnikov, l’autre doigt posé sur son détonateur.

Dans l’étroit couloir, un échange nourri s’engage. Le premier homme de la colonne perd un instant le contrôle du bouclier, qui bascule et tombe sur un otage. Les policiers lancent alors des grenades assourdissantes pour couvrir la progression et tenter d’extraire les otages. En quelques dizaines de secondes, la majorité d’entre eux est évacuée et mise en sécurité.

Trois otages restent toutefois coincés dans l’escalier avec l’un des terroristes tandis que l’autre, toujours face aux forces d’intervention. Quand Ismaël Omar Mostefaï se retrouve à court de munitions, il pose son arme pour activer son dispositif mais n’en a pas le temps : une balle de la BRI touche sa charge et provoque l’explosion. Le souffle part vers le haut, épargnant les policiers. Le premier terroriste du duo est donc tué 55 secondes après le début de l'assaut.

L'effet de souffle, part vers le haut du couloir et non vers les membres de la BRI, ne blessant personne. Le souffle de l’explosion projette le second terroriste dans l’escalier. Il chute et se retrouve étendu au pied d’une porte. Il tente de saisir son détonateur mais le dépiégeur, placé derrière le premier homme de la colonne, le voit et hurle l’ordre d’ouverture du feu. Deux balles sont tirées et le neutralisent définitivement. Le dernier assaillant du Bataclan est mort.

Le dernier otage, qui se trouvait à la merci des explosions, est d’abord pris pour mort par les membres de la BRI. Ce n’est qu’en le voyant se relever et sortir de la pièce qu’ils comprennent qu’il a survécu. En quittant le Bataclan, les derniers otages sont contraints de traverser la salle principale. Ils passent à proximité de la fosse, où les corps sont entassés les uns sur les autres. Cette vision d’horreur restera gravée en eux.

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Le bouclier « Ramses » utilisé par la BRI lors de la prise d’otages du Bataclan, ici photographié le 4 mai 2021 (Martin Bureau - AFP)

Au terme de l’assaut, le bilan est le meilleur possible pour les policiers et les otages : aucune victime supplémentaire n’est à déplorer. Les deux terroristes retranchés ont été abattus, et tous les otages ont été sortis vivants.

En sortant du Bataclan, les derniers otages prennent pleinement conscience de l’ampleur de l’horreur. À l’extérieur, des dizaines de camions de pompiers, d’ambulances et de véhicules de police illuminent la rue. Ils sont conduits dans une ruelle, où d’autres rescapés ont déjà été rassemblés. Pendant l’assaut et longtemps après, ceux qui s’étaient cachés dans des locaux, des bureaux ou dans les faux plafonds sortent à leur tour, un par un. Chaque groupe est minutieusement contrôlé pour s’assurer qu’aucun terroriste ne se dissimule parmi eux.

Jusqu’au cœur de la nuit, des survivants continuent d’être évacués du bâtiment. Certains sont conduits en bus jusqu’à la mairie du XIᵉ arrondissement, transformée en cellule d’aide psychologique, où ils peuvent enfin parler à quelqu’un d’extérieur à ce qu’ils viennent de vivre. D’autres choisissent de rentrer directement chez eux pour retrouver leurs proches et tenter, malgré le choc, de reprendre une vie normale.

"On a sorti des centaines de personnes, peut être 500 ou 600 personnes, entre le moment où on est arrivé devant le Bataclan et la fin de l'assaut"

Commissaire Christophe Molmy

Chef de la BRI

À la fin, il ne reste plus que les corps, entassés dans la fosse, et le seul bruit qui se fait entendre est celui des appels de tous les proches et qui n'auront malheureusement jamais de réponse. Le bilan provisoire à 4 h 18 fera état de 82 décès, 56 blessés graves et 58 blessés légers.

Hommages et réactions

Le lendemain, un ciel bas et gris accompagne une ville encore hébétée. Paris tente de reprendre son souffle mais reste figée par ce qu’elle vient de vivre.

Le dimanche, le ciel bleu est de retour. Dehors, une foule silencieuse se presse devant les grilles des bars et restaurants touchés mais aussi du Bataclan. Les Parisiens déposent des bougies, des fleurs, des messages. Aucun bruit, sinon celui des pas. La ville, meurtrie, cherche à comprendre. Partout en France et au-delà des frontières, les hommages affluent. Paris pleure, et le monde avec elle.

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Un couple se recueille devant le restaurant "La Belle Équipe" au lendemain de la tragédie (Jacky Naegelen - Reuters)

Le président François Hollande décrète un deuil national de trois jours ainsi que l'état d'urgence sur tout le territoire. Dès le 13 novembre, les réactions affluent du monde entier. Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, dénonce des « attaques misérables ». Barack Obama est le premier à s’exprimer, affirmant que les États-Unis se tiennent « aux côtés des Français » et citant, en français, la devise « Liberté, Égalité, Fraternité ».

Partout, les hommages se multiplient. Le Brésil illumine ses monuments aux couleurs de la France. L’Europe entière exprime sa solidarité, de Juncker à Merkel, en passant par les 28 chefs d’État de l’Union. De Moscou à Tunis, d’Alger à Abuja, les dirigeants condamnent unanimement les attentats. Seul Bachar el-Assad nuance ses propos, accusant la France d’avoir favorisé le terrorisme en Syrie. À l’échelle du globe, monuments illuminés, veillées, messages et drapeaux en berne témoignent d’un soutien sans précédent au peuple français.

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Le Brésil témoigne son soutien à la France en illuminant son palais présidentiel, le Palais de l'Aurore

Bilan des attentats

Dans les jours qui suivent, à mesure que les identités des victimes sont révélées, les visages envahissent les écrans. Jeunes, joyeux, passionnés de musique ou de journalisme, étudiants, amis, amoureux. Ils s’appelaient Thomas, Lola, Matthieu, Aurélie, Juan…

La France pleure ses morts. Au 14 novembre 2015, le bilan s’élève à 129 morts et 354 blessés hospitalisés, dont près d’une centaine en état d’urgence absolue. Dans les jours suivants, un blessé décède, portant le total à 130 victimes. La plus jeune avait 17 ans, le plus âgé 68. L’âge moyen des défunts était de 35 ans. À côté des victimes françaises, plusieurs ressortissants étrangers figurent parmi les morts ou les blessés. Derrière les chiffres se cachent des vies, des visages, des familles et des parcours brisés. La presse publie des portraits : étudiants, artistes, parents, anonymes — tous fauchés alors qu’ils ne souhaitaient que profiter de la vie.

Au 1er mars 2016, le ministère de la Santé dénombre 413 blessés encore hospitalisés, dont plusieurs dizaines nécessitent toujours des soins lourds. Mais les blessures ne sont pas toutes visibles : le traumatisme psychique touche des centaines de survivants, de proches, de témoins. Selon une commission parlementaire, plus de 4 000 personnes ont été affectées physiquement et/ou psychologiquement. Certains ne s’en remettront jamais. Guillaume Valette, rescapé du Bataclan, met fin à ses jours en 2017. Il sera reconnu comme la 131e victime. D’autres suivront, comme France-Élodie Besnier en 2021 ou le dessinateur Fred Dewilde en 2024.

Les attentats du 13 novembre 2015 sont les plus meurtriers jamais perpétrés en France. Ils demeurent aussi les plus lourds en Europe depuis ceux de Madrid en 2004. Mais le bilan aurait pu être encore plus tragique sans la réactivité des forces d’intervention, la mobilisation des secours et l’engagement de tous ceux qui, cette nuit-là, ont mis leurs compétences et leur sang-froid au service des victimes. Leur action a empêché que l’innommable ne prenne une ampleur encore plus funeste.

Une traque pour retrouver les derniers terroristes vivants s'organise en parallèle pour mettre fin à la captivité des ennemis numéro 1 de la nation.

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